Previous Page  15 / 16 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 15 / 16 Next Page
Page Background

Galerie Michel-Ange

Denon, Rez-de-Chaussée, salle 4

Ce jeune homme ailé qui vient de se poser sur un rocher où git

sans connaissance une jeune fille, c’est le dieu Amour–ou Cupidon

en latin–reconnaissable à ses ailes et à son carquois rempli de

flèches. La jeune fille se nomme Psyché. Vénus, déesse de la Beauté

et mère de l’Amour, exigea qu’elle rapportât des Enfers un flacon lui

interdisant rigoureusement de l’ouvrir.

Mais la curieuse ne put s’en empêcher : ayant respiré les effluves

infernaux, elle tomba aussitôt dans un profond sommeil proche de la

mort. La voyant étendue sans vie, Amour accourut à tire-d’aile ; du

bout de sa flèche il la toucha légèrement, afin de s’assurer qu’elle

n’était pas morte. C’est l’instant saisi par le sculpteur :Amour enlace

tendrement Psyché, la redresse, et rapproche son visage de celui de sa

bien-aimée. Psyché se laisse doucement aller vers l’arrière, et d’un

geste alangui saisit la nuque de son amoureux.

Une composition complexe

Canova semble avoir fait de nombreuses recherches avant d’élaborer

cette très savante composition, dont l’origine est une peinture

romaine découverte à Herculanum, que le sculpteur visite lors de

son séjour à Naples, en 1787. Canova copie précisément la position

accroupie de l’homme, de même que la pose allongée de la femme,

et le geste de ses bras. Puis il modèle de nombreuses figures en terre,

d’où se dégage peu à peu l’enlacement des corps.

La position des jambes de Psyché et d’Amour délimite un volume

pyramidal, qui assoit solidement la composition sur le rocher.

Canova réussit à conjuguer à la fois une réelle stabilité et une

rotation complexe et dynamique. Il fait tournoyer sa composition :

depuis le pied droit d’Amour, le mouvement suit l’enlacement des

bras qui soulèvent Psyché, affirmant ainsi son retour à la vie.

La verticalité des ailes accentue le mouvement d’ascension. La

charge émotionnelle et sensuelle est accentuée par l’écart entre les

visages des amants. Le temps semble suspendu avant l’embrasement :

l’embrassement final.

Quand le marbre devient chair...

Si les œuvres de Canova donnent une telle impression de vie, cela est

dû au travail particulièrement subtil et diversifié sur la surface du

marbre. On appréciera ici les traces de gradine volontairement

laissées sur la surface du rocher, les différences de grain entre le

drapé du tapis posé au sol et la légère mousseline qui enserre les

hanches de Psyché. Le lissé des chairs est obtenu au moyen de râpes

de plus en plus fines : ici, sur le visage d’Amour, on en distingue très

bien les traces.

Le vase est un élément traité à part : son poli particulier vient de ce

qu’il a dû être tourné avec des poudres à polir, puis lustré. Sculptées

à part également, et finement gravées, les ailes d’Amour sont

insérées dans son dos avec beaucoup de précision. Des traces de léger

duvet ont pour fonction de dissimuler au mieux le raccord des ailes

sur le dos. Les ailes ont une épaisseur et une matérialité incroyable,

mais au soleil, à contre-jour, elles sont translucides, et d’une

magnifique teinte dorée.

Cette œuvre dans tous ses détails est la démonstration brillante de la

virtuosité de Canova sculpteur sur marbre.

Psyché ranimée par le baiser

de l'Amour

de Antonio CANOVA

Possagno, 1757 - Venise, 1822

1793

Marbre

Département des Sculptures

Sculptures italiennes (MR 1777)

Commandé par le colonel John Campbell en

1787;acquis en 1801 par Joachim Murat

H.:1,55 m. ; L.:1,68 m. ; Pr.:1,01 m.

Auteur :Isabelle Leroy-Jay Lemaistre

15