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L’apparition de la structuration
administrative du musée d’aujourd’hui
La notion de «musée » est alors mal définie, sur
le plan formel comme sur le plan administratif.
Si les présentations des collections dans le Louvre
du 19e siècle sont effectivement à l’origine des
départements tels que le Louvre du 21e siècle
les connaît, il ne faut pas pour autant confondre
départements et collections : la structuration
des départements apparue tout au long du
19e, et qui s’est vue conforter après la Seconde
Guerre mondiale par les ordonnances de 1945,
ne se superpose pas exactement aux répartitions
de collections dans le Palais, et aux histoires
scientifiques des collections.
Cela explique certaines attributions de fonds
cohérents à des départements plutôt qu’à d’autres,
certains recoupements entre départements, et la
création tardive de certains départements, comme
lesObjetsd’art, administrativement créé seulement
en 1893 alors que ses collections sont pour une
partie issues des collections royales, des Arts
graphiques administrativement créés seulement
après guerre ou encore des Arts de l’Islam, créé en
tant que département seulement au 21
e
siècle alors
que les collections étaient présentées dès le 19
e
siècle. Cette confusion, qui relève exactement de
l’imbrication entre l’histoire de l’administration
des Beaux-Arts puis de la Culture et l’histoire du
Louvre, doit être ici soulignée comme un héritage
de cette période.
Cette histoire des départements du Louvre
progressivement constitués les uns à partir
des autres, perçue à tort comme strictement
identique à celle de la présentation des collections,
a de nombreuses implications pour le Louvre
d’aujourd’hui :
•
d’une part, en termes de gestion des collections,
car les périmètres des départements, la
responsabilité des collections, le partage des espaces
ne sont pas toujours clairs, ou, tout le moins, ne
sont arrêtés par aucun texte officiel. Une tradition
de répartition entre départements est bien établie
mais connaît de nombreuses exceptions ;
•
d’autre part, car la confusion entre structuration
administrative et présentation des collections
se poursuit jusqu’à aujourd’hui : si le projet de
création d’un département des Arts de Byzance
et des Chrétientés d’Orient, envisagée dans
les années 2000, a été abandonné, c’est bien
parce que l’absence de département en tant
qu’entité administrative n’est pas nécessairement
contradictoire avec la présentation des collections
permanentes.
L
e
20
e
siècle au
L
ouvre
:
la modernisation du musée
La deuxième moitié du 19
e
a posé les bases du
Louvred’aujourd’hui,muséemoderneetàvocation
universelle. Toute l’histoire du Louvre depuis s’est
inscrite dans la continuité de ces avancées, soit pour
poursuivre le développement du musée, soit pour
corriger certains dysfonctionnements, notamment
dans la répartition des collections dans le Palais.
L’histoire du Louvre au 20
e
siècle se confond
logiquement avec les grands événements du siècle,
et notamment avec les deux conflits mondiaux.
La Première Guerre mondiale marque le Louvre
comme l’ensemble du pays. D’un point de vue
purement muséographique, c’est à la menace des
zeppelins allemands que l’on doit au Palais le
creusement de caves pour la protection des œuvres,
transformées en réserves.
Durant la période entre les deux conflits
mondiaux, l’institution connaît d’importants
bouleversements avec le renforcement de
l’organisation et de l’administration, et le
développement de la gestion et de l’étude des
collections scientifiquement dirigées par une
conservation de haut niveau. S’affirme alors le
rayonnement national et international du Louvre,
qui poursuit sa cohabitation avec la direction des
musées toujours installée dans le Palais.
L’après-guerre et le plan Verne :
le premier remaniement du Louvre au
profit des collections
Le Palais est profondément marqué par les
ambitions d’Henri Verne (1880-1949), directeur
des Musées nationaux et du Louvre qui est à
l’origine de la première grande transformation du
Louvre au 20
e
siècle, avant puis après la Seconde
Guerre mondiale.
Le «plan Verne» donne alors au Palais des
perspectives d’avenir, imaginant sa reconquête et
entreprenant une répartition plus cohérente des
collections. Il marque à la fois les salles (peintures
en Cour carrée, présentation de la chapelle de
Baouit, pose d’une verrière sur la cour du Sphinx
pour exposer les sculptures antiques ; ouverture
de salles de sculpture européenne dans l’aile de
Flore et de salles d’objets d’art et de peintures
dans la Cour carrée ; aménagement complet des
salles des Antiquités égyptiennes et orientales),
les circulations (escalier Daru et creusement des
cryptes pour permettre la circulation continue
de la Cour carrée), les installations techniques
(électrification généralisée) et les réserves du musée,
réellement créées à cette époque dans le Louvre,