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Le Louvre sous l’Occupation

L’histoire du Louvre pendant la Seconde Guerre

mondiale a fait l’objet de nombreuses études,

tant pour souligner le courage de Jacques Jaujard

que celui de Rose Valland, parmi d’autres

personnalités de cette époque. Les collections du

Louvre, évacuées vers la province dès 1939, ont pu

être sauvegardées, et le Louvre du Paris occupé

est un musée presque vide. Ce pan de l’histoire

du Louvre est toujours présent dans le musée

du 21e siècle, sous l’angle particulier des biens

spoliés, tracés par Rose Valland au Jeu de Paume,

qui ont pu, sous le statut des «Musées Nationaux

Récupération» (MNR), être déposés après guerre

au Louvre, et dont la restitution est une priorité

pour tous. Il y a actuellement 1882 MNR identifiés

et conservés au Louvre.

1945 : l’organisation des musées nationaux

et son impact sur le Louvre

L’après-guerre marque une nouvelle ère dans

l’histoire du Louvre et des musées nationaux : par

les ordonnances de 1945, les musées nationaux

sont organisés, et la répartition des collections

alors actée marque la fin définitive de l’utopie

du musée universel du Louvre. Le Louvre est

particulièrement affecté par la création du musée

d’Art moderne au Jeu de Paume, ainsi que par celle

du musée Guimet en 1943, mais la dynamique de

création de musées plus spécialisés se poursuivra

tout au long de cette moitié du siècle et aboutit à la

structuration actuelle des musées nationaux.

Cette organisation des musées par l’ordonnance

puis le décret de 1945 constitue comme une grande

synthèse de l’ensemble des questions posées par

l’histoire des musées en France depuis le 19

e

siècle :

d’une part, parce qu’elle répartit officiellement

et juridiquement les collections jusqu’ici réparties

selon des logiques d’opportunités ;

d’autre part, parce qu’elle organise l’ensemble

de la politique muséale en créant, en plus des

musées nationaux, les « grands départements

patrimoniaux », référents scientifiques dans

leurs domaines, et les musées classés et contrôlés,

partout en France : les liens entre les musées et

entre les collections publiques sont ainsi inscrits

dans la loi ;

enfin, parce qu’elle crée les départements du

Louvre, achevant une structuration administrative

en évolution depuis le 19

e

siècle, et qui se superpose

aux présentations des collections au Louvre dans

les champs de ces départements patrimoniaux.

L’année 1945 marque donc une date importante

dans l’histoire des musées et celle du Louvre, qui

ne connaîtra pas de modification administrative de

cette ampleur avant la création de l’Établissement

public du musée du Louvre (EPML) en 1992.

L’expansion des collections se poursuit toutefois.

Le musée éprouve de grandes difficultés à concilier

extension des espaces des surfaces d’exposition et

conservation des œuvres : il dissémine ses réserves

dans les sous-sols et les pavillons, utilisant autant

que possible les salles fermées pour des travaux

qui tardent à se faire.

Pour le Louvre d’aujourd’hui, les conséquences

de cette histoire récentes sont nombreuses et

essentielles pour la compréhension des projets du

Louvre après 2015 :

les espaces conçus par le plan Verne sont soit

ceux conservés, soit ceux parachevés par le Grand

Louvre, soit encore certains projets à venir. Le

Louvre hérite en particulier de la réflexion de

Verne sur la répartition entre salles permanentes et

salles d’expositions temporaires (le Jeu de Paume

ayant cette vocation jusqu’à sa transformation en

musée des Impressionnistes) / réserves / politique

de dépôts. Les problèmes non résolus par le plan

Verne, à l’inverse, spécifiquement la question des

circuits dans le musée et des entrées, sont aussi ce

qui a guidé en partie le projet du Grand Louvre ;

la répartition des collections entre musées par

les ordonnances de 1945 définit, en creux, celles

confiées au musée du Louvre, dont aucun autre

texte ne précise le périmètre : cette histoire croisée,

peu explicitée en dehors des textes de 1945, est au

cœur des questions de périmètre du Louvre avec

les autres musées nationaux, notamment dans le

cadre du récolement décennal des collections ;

les textes de 1945, en définissant les départements

patrimoniaux, créent le cadre de travail au niveau

national des conservations du Louvre ;

la politique de dépôts, fortement relancée dans

les années 1950, explique également beaucoup de

liens, dans la lignée de ceux créés par le décret

Chaptal, avec les musées de France, et l’importance

de l’action territoriale du Louvre aujourd’hui.