Dossier pédagogique Léonard de Vinci

8 En quoi les manuscrits conservés à l’Institut de France sont-ils si importants pour comprendre la démarche de Léonard? V. D. : le prêt de ces douze carnets manuscrits, conservés à la bibliothèque de l’Institut et très rarement vus, est fondamental : ils permettent d’évoquer de manière extraordinaire ce que Léonard appelle la « science de la peinture ». Artiste reconnu dès les années 1480, ayant acquis cette liberté dans la pratique graphique puis picturale, il n’avait cependant réalisé que quelques études d’ingénierie et essentiellement des dessins artistiques. À partir de la fin des années 1480, il commence à tenir des carnets, de divers formats. De quels sujets traitent ces manuscrits ? L. F. : Léonard y aborde tout l’univers, ses structures fondamentales : les mathématiques, la géométrie, la physique, la mécanique – c’est-à-dire l’étude du mouvement, des équilibres, des poids –, la mécanique des fluides, l’optique, l’astronomie ; il étudie la géologie, la géographie, l’hydrologie, la zoologie, la botanique, l’anatomie, l’urbanisme, l’architecture, etc. Tout ! Pourquoi ? Parce que, voulant représenter ou récréer le monde réel, il lui faut en connaître l’essence intime : toutes les sciences deviennent ainsi des instruments de la peinture. C’est un projet infini... L. F. : il ne renonce à rien de ce projet qui est ainsi, de tous côtés, profondément lié à l’inachèvement. Cette quête infinie, qui l’occupe jusqu’à la fin de sa vie, n’est en effet jamais extérieure à la peinture, puisqu’elle est constitutive, chez Léonard, de son désir de peintre. Et c’est la peinture elle-même qui est science suprême : elle annexe toutes les autres puisqu’il faut les maîtriser afin de pouvoir recréer le monde par la peinture. La peinture, science suprême, est ainsi science divine. La liberté s’accomplit dans la science, et la liberté fondée sur la science ouvre la voie de la parfaite imitation de la vie. Qu’aimeriez-vous que le visiteur comprenne, en plus de tout ce que vous venez de dire, de Léonard? V. D. : j’aimerais que l’exposition permette aux visiteurs de comprendre le véritable sens du mot « génie ». Dans le cas de Léonard, il s’agit d’un homme qui est allé jusqu’au bout des choses, et, selon un modèle qui nous parle encore aujourd’hui – celui de l’engagement dans une voie choisie par passion qui nous guide, avec une liberté totale, connue et acceptée par tous ses contemporains. Pour en savoir plus sur le magazine Grande Galerie : http://editions.louvre.fr/fr/grande-galerie.html

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