Trajectoires - Faits marquants 2024

Le Louvre toujours plus ouvert à ses publics Bilan d’activité - 2024 66 oublier, un engagement à transmettre la mémoire et un constant rappel à l’action. L’exposition que nous avons construite ensemble manifeste notre engagement à éclairer toujours davantage l’histoire des violences et des spoliations dont les familles juives ont été les victimes au cours de l’Occupation pour qu’aucune tache ne demeure dans les collections nationales.» Le Louvre acquiert le relief Hyde, un relief romain à l’histoire mouvementée Les collections d’antiquités romaines du Louvre se sont enrichies d’un relief qui appartenait audécor d’unmonu- ment célébrant le régime impérial. Une œuvre dont les pérégrinations contemporaines font de son acquisitionun témoignage des heures sombres du 20 e siècle. Attestée à Rome depuis la fin du 19 e siècle, l’œuvre rejoint en 1928 la collection d’art du riche américain JamesHazenHyde installé à Paris. En juin 1940, durant l’avancée nazie vers Paris, alors que James H. Hyde fuit au Portugal avant de rejoindre les États-Unis, ses collections sont ciblées puis saisies par l’occupant. Si une grande partie lui furent restituées, quelques objets firent exception, dont ce relief romain. Sa trace fut retrouvée dans une maison de maître à Mortagne-au-Perche plusieurs décennies plus tard. A-t-il été laissé sur place dans les heures qui suivirent le débarquement allié en Normandie par la 12 e division SS, stationnée précisé- ment à Mortagne? Après avoir établi l’identité du relief et du bien spolié à James H. Hyde, les propriétaires d’alors restituèrent la sculpture aux héritiers du collectionneur new-yorkais. Son acquisition aujourd’hui par le musée du Louvre, en plus d’enrichir de façon significative le panorama de l’art romain, constitue un témoignage supplémentaire de l’engagement à rendre justice des crimes nazis. «Faire humanité ensemble », la Chaire du Louvre de Souleymane Bachir Diagne Chaque année depuis 2009, la Chaire du Louvre est l’oc- casion pour un grand penseur contemporain de poser un autre regard sur le musée, son histoire et ses collections. En 2024, elle a été confiée au philosophe Souleymane Bachir Diagne, professeur à l’université Columbia de NewYork, dont les travaux portent, en particulier, sur les questions posées par la traduction, le dialogue des cultures et le nomadisme des œuvres d’art. «Louvre: quels universels?», c’est la question à laquelle Souleymane Bachir Diagne a tenté de répondre au cours des cinq conférences données au Louvre entre le 25 novembre et le 5 décembre. Il s’est notamment inter- rogé sur lamanière dont la présence d’objets venus «d’ail- leurs» pouvait perturber et redéfinir les récits duLouvre. « Il y a là une seconde voie vers l’universel : non plus l’universalisme de surplomb (…) mais comme un universel latéral (…), incessante mise à l’épreuve de soi par l’autre et de l’autre par soi », écrivait Merleau- Ponty en 1960. Reprenant à son compte cette vision de cultures placées « côte à côte » et non pas « les unes sur les autres », se projetant ensemble vers un horizon commun d’universalité, le philosophe proposait de réfléchir à la possibilité pour le Louvre, de se faire le lieu d’expression de l’«universel latéral ». Au fil de son étude, Souleymane Bachir Diagne a observé comment les objets « louvrisés » ont pris racine au musée, s’y sont installés pour trouver des significa- tions nouvelles. Cette analyse l’a conduit à envisager le Louvre non pas comme un récit unique, qui tiendrait le reste à la périphérie, mais comme un faisceau d’his- toires enchâssées, un « récit de récits », fait d’autant de centralités qu’il y a de cultures représentées.

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