Trajectoires - Faits marquants 2024

Le Louvre en mouvement Bilan d’activité - 2024 14 Le travail accompli par Bénédicte Trémolières et LaurenceMugniot a permis à cet immense chef-d’œuvre de la peinture du 19 e siècle de retrouver l’éclat, la fraî- cheur et la merveilleuse harmonie de couleurs propre à l’artiste. Restituant l’illusion tridimensionnelle, la restauration a offert notamment aux personnages de se détacher à nouveau les uns des autres : loin de se résumer au trio central (la Liberté, son drapeau et son jeune compagnon), celui-ci fourmille de détails jusqu’à sa périphérie, à l’image de ce soulier de cuir usé, aban- donné dans l’angle, tout en bas à gauche. Questions à Sébastien Allard, directeur du département des Peintures D’importantes restaurations d’œuvres ont été réalisées en 2024, certaines avec des partis pris forts, à l’image de celles des «Saisons» d’Arcimboldo. Pouvez-vous nous en parler ? Le Louvre mène depuis une dizaine d’années une politique ambitieuse en matière de restauration, une activité qui se trouve au cœur de notre métier de conservateurs, notamment au sein du département des Peintures. À travers elle, nous devons parvenir à articuler plusieurs temporalités : nous gérons un patrimoine afin de le transmettre le plus longtemps possible au futur et de le donner à voir au public d’aujourd’hui. Dans le cas de la restauration des Saisons d’Arcimboldo, alors que le cahier des charges initial prévoyait un simple allègement de vernis, une question s’est rapidement posée aux restaurateurs : que faire des guirlandes de fleurs qui recouvraient les bords des compositions dont on savait déjà qu’elles avaient été ajoutées postérieurement à Arcimboldo? Au cours de la restauration, l’analyse chimique des pigments a indiqué que celles-ci dataient au mieux du 18 e siècle, voire du 19 e siècle. Par ailleurs, l’imagerie scientifique a démontré que ces fleurs recouvraient sur environ quatre centimètres la peinture originale sur les quatre bords, cachant non seulement le fond noir uni, si important pour la respiration des figures, mais aussi des parties significatives des têtes composées. On a également compris que les modifications de format opérées depuis le 18 e siècle avaient rompu le parfait alignement des têtes et de leur regard. Fort de ces découvertes, la décision a été prise de retirer les guirlandes afin de retrouver la matière d’Arcimboldo. C’est ainsi que plusieurs fleurs couronnant la tête du Printemps se sont révélées sous les repeints, tout comme l’ensemble des armoiries de Meissen sur le manteau de L’Hiver . La suppression de la guirlande a rendu aux figures leur lisibilité, mais aussi une respiration et une monumentalité saisissante. On peut désormais apprécier la subtilité de la technique picturale de l’artiste qui module la couleur comme l’ombre et la lumière pour décrire précisément les végétaux et leur donner du relief. Il crée ainsi l’illusion d’un mouvement et d’une expression. À l’issue de la restauration, l’aménagement des cadres des tableaux a permis de retrouver l’alignement des regards des quatre saisons dont le dialogue peut à nouveau s’épanouir. Les restaurations révèlent parfois des surprises, comme la couleur de la tunique de la Liberté de Delacroix, est-ce une manière de redécouvrir les œuvres, y compris pour les spécialistes ? Depuis sa création, il y a presque deux siècles, la force expressive de La Liberté guidant le peuple de Delacroix n’a jamais faibli, devenant le symbole de nombreuses luttes de libération par le monde. Elle fait partie de ces rares œuvres qui toujours «se rechargent » en fonction du contexte politique, social, culturel dans lequel on les regarde. La restauration que nous avons menée lui redonne pleinement cet Cet immense chef-d’œuvre de la peinture du 19 e siècle a retrouvé l’éclat, la fraîcheur et la merveilleuse harmonie de couleurs propre à l’artiste.

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