Images du Louvre - Dossiers documentaires
La Pietà / Dossier documentaire 6 comprendre l’ œuvre Considérée comme un chef-d’œuvre du 15 e siècle français, La Pietà de Villeneuve-lès- Avignon est paradoxalement une peinture mal connue. Aucun document, aucun prix-fait n’identifient son auteur ni les circonstances de la commande. Si Prosper Mérimée propose en 1834 d’y voir la main de Giovanni Bellini, d’autres par la suite l’ont rapprochée tour à tour des écoles italienne, allemande, flamande, française, espagnole, portugaise ou provençale. L’attribution la plus probable est celle formulée en 1959 par l’historien de l’art Charles Sterling (1901-1991), qui a avancé le nom d’Enguerrand Quarton, l’une des figures majeures de ce mouvement pictural que l’on a baptisé par commodité « école d’Avignon ». L’œuvre fut sans doute peinte vers 1455 pour l’église collégiale de Villeneuve-lès-Avignon – dont le donateur agenouillé pourrait avoir été l’un des chanoines. Ce dernier a fait l’objet de plusieurs hypothèses d’identification, notamment avec Jean de Montagnac, représenté dans un autre tableau d’Enguerrand Quarton, le Couronnement de la Vierge du musée Pierre-de-Luxembourg à Villeneuve-lès-Avignon. L’un des arguments invoqués par les partisans de cette dernière proposition est la similitude de son visage émacié avec celui de l’ecclésiastique de la Pietà du Louvre. Enguerrand Quarton a exercé une influence profonde sur la peinture provençale de la seconde moitié du 15 e siècle. Le séjour de la papauté en Avignon entre 1309 et 1417, fin du Grand Schisme d’Occident, avait suscité l’éclosion d’un foyer artistique très actif et l’arrivée précoce d’artistes remarquables comme le Siennois Simone Martini qui réside à la cour pontificale entre 1336 et 1344. Il n’est pas impossible que ses œuvres aient pu inspirer l’auteur de la Pietà de Villeneuve-lès-Avignon . Mais aucun des peintres contemporains d’Enguerrand Quarton, pas même Barthélemy d’Eyck (connu de 1444 à 1471-1472), n’a su restituer une pareille intensité spirituelle, une telle retenue dans l’expression de la douleur. le thème de la pietà Ce thème est très souvent figuré à la fin du Moyen Âge, une période marquée par une grande angoisse religieuse. Le thème de la Pietà – ou Vierge de Pitié –, ici représenté, montre la Vierge Marie recueillant sur ses genoux le Christ mort sur la croix. C’est le moment où elle accepte sa mort et prie. Cet épisode de la Passion, tiré des évangiles apocryphes , précède la mise au tombeau du Christ et sa Résurrection. À cette scène est ici combiné un autre thème iconographique très prisé, la Lamentation, puisqu’ici sont associés aux pleurs de la Vierge ceux de saint Jean l’Évangéliste et de Marie-Madeleine. La formule iconographique de la Vierge en priante, les mains jointes, est née dans le nord de l’Europe. Contrairement à la représentation traditionnelle où la douleur est visible, les mains crispées, par exemple pour la Pietà de Rogier van der Weyden (Musées royaux des beaux-arts de Belgique à Bruxelles), l’œuvre d’Enguerrand Quarton s’en démarque car la souffrance est ici retenue.
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