Images du Louvre - Dossiers documentaires

Panneau à la joute poétique / Dossier documentaire 8 l’art en iran à l’époque safavide L’art iranien atteint son apogée au 15 e siècle, époque de la Renaissance timouride, dans des villes telles que Hérat et Balkh (situées toutes deux en Afghanistan actuel, ce qui montre que le monde iranien – espace géographique de langue persane – s’étendait bien au-delà des frontières de l’Iran actuel), Méched et surtout à Samarcande, capitale si chère à Tamerlan. L’avènement des Safavides au début du 16 e siècle marque un renouveau, sans pour autant provoquer de rupture brutale avec le passé. La dynastie safavide est la première dynastie proprement « nationale » de l’Iran islamique, qui instaure le chiisme comme religion d’État. L’art safavide naît à Ispahan quand Shâh ‘Abbas I er décide de réinstaller sa cour dans cette ville, en lui redonnant le rôle de capitale qu’elle avait au Moyen Âge (puis perdu au profit de la ville de Qazvîn) et entreprend d’importants travaux d’urbanisme. Il se caractérise par l’amour du luxe et de la beauté, la finesse du travail, le sens de l’harmonie et le goût pour les couleurs vives. Le Panneau à la joute poétique reflète plus précisément le style du peintre Reza-e Abbasi, qui va influencer la production de peinture au moment où la cour safavide s’installe à Ispahan. On réunit alors sous l’appellation d’« école d’Ispahan » les productions peintes qui suivent ce style initié par Reza puis adopté par ses élèves et suiveurs. Ce style perdure jusque au troisième quart du 17 e siècle. l’influence chinoise Les visages ronds et plats des personnages, sereins, aux yeux en amande s’étirant jusqu’aux tempes, aux petites bouches esquissant un léger sourire, correspondent aux canons de beauté loués par la poésie persane de l’époque. On y décrit des visages « de lune à la bouche menue » et aux « lèvres couleur coraline ». Ce sont les mêmes caractéristiques stylistiques qui apparaissent dans les rares exemples laissés par l’art du livre illustré. Ces personnages aux « visages de lune », ronds et épanouis, sont caractéristiques de l’esthétique safavide. D’autres motifs décoratifs trahissent une influence chinoise comme les flammes sur la tunique du personnage de gauche et les nuages, dont les volutes sont typiques de l’art du pays du Levant. Au 17 e siècle, les rapports commerciaux entre Chine et Iran sont intenses. De plus, Ispahan se trouve sur l’une des routes commerciales liant l’Orient à l’Occident, la route de la Soie. L’Iran, grand producteur de soie brute, apprécie beaucoup les précieuses soieries tissées venant de Chine, qui influencent sa production. Amateur de porcelaine chinoise, le souverain-mécène iranien stimule la production de céramique de grande qualité, tentant d’égaler la blancheur et la dureté de la porcelaine au kaolin dont la Chine détenait la recette de fabrication. L’Iran produit dès lors des imitations de porcelaines chinoises dont le personnage féminin en tient probablement un spécimen avec ce bol bleu et blanc (appelé porcelaine kraak). Ces influences extrême-orientales furent adoptées et adaptées par la dynastie timuride (1370-1506), et se poursuivirent, en se transformant encore à l’époque safavide, suivant en cela l’évolution formelle des céramiques chinoises elles-mêmes.

RkJQdWJsaXNoZXIy NDYwNjIy