Rapport d'activité 2018
Rapport d’activité - 2018 114 Interview de Monsieur SÉbastien Daucé, directeur musical de l’ensemble Correspondances En tant que musicien, quels rapports entretenez- vous avec les autres arts présents au Louvre ? Plus on remonte dans le temps, plus les œuvres sur lesquelles nous travaillons demandent à être ré-imaginées, souvent parce que leur notation jadis était parcellaire : pour pouvoir les rejouer, cela demande d’aller au-delà de ce qui est noté sur la partition. Comment repenser ces œuvres aujourd’hui ? D’abord en essayant de connaître au maximum leur technique, comme si on se mettait dans la peau de leur auteur, mais aussi en cherchant à connaître leur contexte historique et esthétique. Pour cela, il est vivifiant de se plonger dans les collections d’art contemporain de ces œuvres ! Quels liens faites-vous entre votre pratique de musicien et les œuvres du musée ? Toutes ces collections de joyaux des temps passés constituent autant de trésors d’inspiration pour l’imagination aujourd’hui. Mais ce sont parfois aussi de véritables indices dans les recherches que je mène sur un projet musical. Par exemple, en travaillant plusieurs années sur le Ballet royal de la nuit, dont les mémorialistes parlent comme du plus beau spectacle du 17 e siècle, au cours duquel Louis XIV est devenu le Roi-Soleil, j’ai été amené à consulter les exceptionnels dessins de costumes de ballet de cour de la collection Rothschild au Louvre : ils font partie des innombrables trésors des réserves du musée, mais j’ai eu la chance de les approcher ! Ces sublimes dessins nous renseignent très précisément sur le faste de ces grands spectacles, sur le talent infini de tous les artistes qui y ont contribué. Pensez-vous que votre pratique musicale puisse rendre les collections du musée plus vivantes ? Évidemment, dans l’autre sens, jouer la musique du 17 e siècle et la faire résonner près d’œuvres peintes ou sculptées leur redonne une nouvelle vie. Elles ont à la fois la chance d’être complètes et le malheur d’être figées : c’est tout l’inverse de la musique ! Il m’a toujours semblé, comme à tous les musiciens, que cette performance musicale au milieu de ces œuvres était comme les sortir, le temps de la musique, de l’éternité pour leur redonner la vitalité de leur création. Avec l’ensemble Correspondances, nous avons eu la chance de tenter cette expérience dans certains des plus beaux musées du monde, comme encore récemment au milieu de la Frick Collection à New York : l’expérience ne manque jamais… C’est aussi pour cela que l’ensemble Correspondances et moi-même sommes si heureux de nous retrouver associés aujourd’hui au Louvre ! Cet échange entre les œuvres du passé et les musiciens d’aujourd’hui est au cœur de ce que nous avons toujours voulu partager avec le public : c’est même ce qui a donné son nom à l’ensemble… Et de fait, la musique est une fontaine de jouvence pour tous ces joyaux d’art des temps anciens, qui nous les rend bien vivants aujourd’hui, et profondément réjouissants.
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