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La réputation d’Eugène Isabey (1803-1886) n’a guère connu d’éclipse : l’abondance de son œuvre a assuré sa postérité sans besoin d’un procès en réhabilitation. Fils de Jean-Baptiste Isabey (1767-1855), le plus célèbre des miniatu- ristes de l’Empire, Eugène sut imposer avec fougue son prénom : à la précision et à la suave délicatesse de l’un, l’autre répondit par la richesse de sa palette et la générosité de sa touche. En dramaturge romantique, Eugène Isabey orchestra d’emblée d’immenses scènes de naufrage. Ouvert aux innovations d’outre-Manche, il sut pareillement renouveler l’art du paysage lithographié, révélant une Auvergne tourmentée qui n’avait rien à envier à l’Écosse de Walter Scott. Isabey emprunta aussi le goût des costumes historiques à la litté- rature de son temps. Ses évocations chatoyantes de la cour d’Elisabeth ou des derniers Valois lui assurèrent une clientèle avide de retrouver ainsi transfigurés les fastes du Second Empire.

Fondée principalement sur les richesses du département des Arts graphiques, cette exposition estivale s’attarde moins sur cette production de cape et d’épée que sur l’exploration inédite des rivages normands et bretons. D’Étretat à Saint-Malo, cette vision tourmentée de côtes déchiquetées, tour à tour battues par les vents ou écrasées de soleil, nous rappellent que derrière le virtuose de la gouache et de l’aquarelle, se cache un artiste authentique, de ceux qui font regarder autrement le spectacle de la nature, leçon à laquelle furent sensibles Jongkind comme Boudin.

Commissaires de l’exposition : Christophe Leribault.

Du 5 juillet au 17 septembre / Aile Sully, 2e étage, salles 20-23

Eugène Isabey (1803-1886) Par les ruelles et par les grèves

— Le catalogue de l’exposition Christophe Leribault. Collection « Cabinet des dessins ». Coédition Le Passage / musée du Louvre éditions. 88 p., 51 ill., 19 €.

Avec le soutien d’ARJOWIGGINS GRAPHIC.

Eugène Isabey, Rochers à Saint-Malo, Paris, musée du Louvre